Le concept de leadership éthique gagne en popularité; une nouvelle génération d’employés exige davantage des organisations pour lesquelles ils travaillent. Dans un monde où le concept d’étalage de vertu est de plus en plus passé sous la loupe, le leadership éthique arrive-t-il à son terme, ou continue-t-il d’évoluer? Comment les membres de la direction des affaires de l’entreprise peuvent-ils veiller à ce que l’éthique soit intégrée dans les pratiques organisationnelles?
Affaires de l’entreprise : la boussole morale
Les affaires de l’entreprise ont longtemps été considérées comme « la boussole morale de celle-ci », affirme Lucy Yurek, responsable de la communication du groupe Rio Tinto. L’éthique a toujours fait partie intégrante du rôle de la responsable, y compris la promotion de la bonne gouvernance et la défense d’un comportement éthique à l’égard des employés, des clients et des actionnaires.
Directrice des relations avec les entreprises à Channel 4, Miranda Higham reconnaît que « puisque les entreprises s’expriment par leurs actions, l’éthique et les valeurs sont au cœur des rôles liés aux affaires de l’entreprise. Les parties prenantes attendent des entreprises qu’elles innovent, créent de l’emploi et contribuent à la croissance de l’économie. Il est donc essentiel de définir clairement les objectifs, les valeurs et la stratégie d’une organisation. »
C’est cette philosophie que met en application Charlotte Cool, qui travaillait auparavant pour le groupe Compass. Elle a porté à la connaissance de la direction générale du groupe la question du traitement des travailleurs migrants au Moyen-Orient en soulignant les préoccupations des militants, soit d’accorder la priorité aux questions éthiques avant les questions financières. Cette intervention a permis de gérer le risque lié à la réputation tout en continuant à améliorer les conditions de travail des travailleurs, ce qui fait de Compass un exploitant de premier plan dans la région.
Gérer les questions polarisantes
Une pression croissante s’exerce sur les entreprises pour qu’elles prennent position sur une série de sujets qui ne les concernent pas. Alison Taylor déclare dans Higher Ground: How Business Can Do the Right Thing in a Turbulent World : « La triste réalité, c’est que les discours des employés et ceux de l’entreprise se recoupent d’une manière qui rend les conflits organisationnels internes inévitables. » Les entreprises ne peuvent pas se prononcer sur tous les sujets qui préoccupent leurs employés, mais elles peuvent créer une culture d’ouverture au dialogue et de transparence éthique.
Directeur des communications au ministère de l’Intérieur du gouvernement britannique, Rob Hall note que l’éthique dans le leadership est particulièrement importante dans le secteur public, où les valeurs et les objectifs sont essentiels à la mise en œuvre opérationnelle, à l’élaboration des politiques et à l’établissement de la confiance du public. Il s’agit là d’une toile de fond complexe qui permet de naviguer entre des points de vue parfois opposés. Rob affirme : « Le travail du ministère de l’Intérieur est vraiment important. Il est chef de file dans les domaines de l’immigration, de la lutte contre la criminalité et de la sécurité nationale. C’est difficile, c’est contesté; les gens abordent les questions sous des angles très différents. »
Rob cherche des domaines susceptibles d’unifier les gens, de créer des liens et de renforcer la confiance.
À Channel 4, il peut y avoir des différences entre la voix éditoriale et la position de Channel 4 en tant qu’employeur : Miranda a noté que, « en tant que diffuseur de service public, avec un mandat clair visant à présenter un contenu dûment impartial et à représenter des voix non entendues, notre voix éditoriale se trouve au cœur de notre objectif. Ainsi, nous pouvons nous adapter à différentes préférences en tant qu’employeur tout en restant fidèles à nos valeurs. »
La capacité à fournir des conseils éclairés est cruciale. Lucy Yurek fait remarquer que chez Rio Tinto, les membres de l’équipe dont les conseils sont perçus comme étant trop critiques, ou dont on dit qu’ils semblent « monter aux barricades » peuvent être isolés.
Lorsque vient le moment de faire une déclaration, « il faut tenir compte du contexte et la pertinence est essentielle, déclare Lucy Yurek. Je pense qu’un changement de direction est en cours. Nous réalisons qu’il faut faire attention, en particulier dans le cas d’une grande organisation internationale, à laquelle il est demandé d’avoir une opinion sur tout; ce n’est tout simplement pas possible. Au lieu d’assumer un rôle de leader [sur tous les enjeux sociaux], nous visons à apporter un soutien concret aux employés et aux parties prenantes. »
Le leadership éthique présente-t-il un avantage monétaire?
Charlotte a rejoint Asda en tant que directrice des affaires de l’entreprise au début du litige sur l’égalité salariale avec Leigh Day. Son conseil était de faire preuve de leadership et de s’entendre avec les employées. Asda a décidé de se battre et le procès se poursuit depuis plusieurs années, entachant la réputation de l’entreprise et laissant entrevoir un paiement élevé.
Charlotte a passé beaucoup de temps à conseiller les chefs d’entreprise sur les répercussions de la prise de décisions éthiques qui peuvent contredire les conseils juridiques. Dans son rôle actuel de directrice des affaires de l’entreprise à la Poste, elle aide l’organisation à faire passer sa réponse au scandale Horizon d’une approche purement légaliste à une approche plus holistique afin de rétablir la confiance et d’accélérer son redressement commercial.
Il existe un lien plus évident entre une mauvaise évaluation de l’opinion publique et la perte de revenus, lorsque les entreprises se positionnent d’une manière qui va à l’encontre de leurs clients. Qu’il s’agisse de protéger les pertes ou d’accroître les profits, les dirigeants des affaires de l’entreprise jouent un rôle essentiel en offrant des conseils sur une série de questions qui protègent les intérêts des actionnaires.
Le concept de leadership éthique peut évoluer, mais les principes sous-jacents (la transparence, la responsabilité, la bonne gouvernance et la responsabilité sociale) restent essentiels à la réussite des entreprises. Étant donné la complexité de la géopolitique et la nature polarisante des médias, les membres de la direction des affaires de l’entreprise – grâce à leur jugement et à leur instinct ainsi qu’à l’aide des avis des parties prenantes – continuent d’être des conseillers essentiels au soutien des décisions éthiques que doivent prendre les chefs d’entreprise et les conseils d’administration.
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